Statuts et le Règlement de Régime Intérieur

Conflits de voisinage, appartements touristiques et activités gênantes : que peuvent réellement réguler les Statuts et le Règlement de Régime Intérieur ?

  1. Introduction : pourquoi il est plus important que jamais de réglementer la coexistence

Les communautés de propriétaires sont des espaces où cohabitent des personnes aux rythmes, cultures et besoins très différents : appartements touristiques, télétravail, activités professionnelles, animaux de compagnie, travaux continus, mobilité résidentielle accrue… tout cela multiplie les conflits.

Cette réalité est particulièrement intense dans des villes comme Barcelone et L’Hospitalet de Llobregat, où la pression touristique, la densité et la réglementation urbanistique (comme le PEUAT – Plan spécial urbanistique des hébergements touristiques) génèrent des situations de coexistence de plus en plus complexes.

Pour cette raison, la prévention est essentielle. Le meilleur outil préventif est de disposer de règles internes adaptées à l’immeuble et approuvées par la communauté.

  1. Cadre juridique : que dit la Loi sur la Propriété Horizontale (LPH)

Les instruments de base sont :

  • Art. 5 LPH → Titre constitutif et Statuts.
  • Art. 6 LPH → Règlement de Régime Intérieur.
  • Art. 7.2 LPH → Action en cessation contre les activités gênantes, nuisibles, insalubres, dangereuses ou illicites.
  • Art. 17 LPH → Majorités pour l’adoption des accords.

Aucun de ces documents n’est obligatoire, mais leur absence crée un vide normatif qui rend difficile la coexistence et la gestion des conflits.

  1. Les Statuts : fonction, contenu et validité

3.1. Fonction des Statuts

Les Statuts établissent l’architecture juridique de la communauté :

  • limitations d’usage des logements et des locaux,
  • restrictions des activités professionnelles,
  • régulation des appartements touristiques (HUT : habitation d’usage touristique),
  • quotes-parts de participation et charges,
  • conditions pour réaliser des travaux,
  • usage des éléments communs.

3.2. L’unanimité : ce que cela signifie et pourquoi elle est exigée

Pour approuver ou modifier les Statuts, une unanimité réelle est requise (art. 17.6) :

  • tous doivent voter en faveur,
  • l’ensemble des coefficients doit atteindre 100 %,
  • une seule abstention ou un vote contre → l’accord n’est pas valide.

Pourquoi une telle exigence ?
Parce qu’ils régulent des droits essentiels de propriété.

Unanimité tacite (art. 17.8 LPH)
Si un propriétaire n’assiste pas à l’assemblée et ne s’oppose pas dans les 30 jours, son silence vaut vote favorable.
Cela évite les blocages et facilite la réforme des Statuts.

3.3. Exceptions : quand l’unanimité n’est PAS requise

  • Interdiction des appartements touristiques → 3/5 (art. 17.12 LPH).
  • Accessibilité → majorité simple.
  • Améliorations → 3/5.
  • Énergie et télécommunications → majorités spéciales.

3.4. Jurisprudence pertinente

  • STS 4790/2024 → Interdire les HUT requiert 3/5 et non l’unanimité.
  • Autres décisions → Les activités professionnelles peuvent être limitées si elles affectent la coexistence.
  1. Le Règlement de Régime Intérieur : coexistence quotidienne et majorités

4.1. Fonction du Règlement

Le Règlement régule la coexistence au quotidien :

  • bruit, horaires et repos,
  • zones communes,
  • animaux de compagnie,
  • propreté et entretien,
  • visites et livreurs,
  • mesures de sécurité,
  • normes de fonctionnement des services.

Il ne peut pas modifier les droits, mais peut réguler la coexistence en détail.

4.2. Comment est-il approuvé ? Majorité simple

(Art. 6 LPH)

Une majorité simple est requise :

  • plus de votes favorables que défavorables,
  • parmi les présents et représentés,
  • les abstentions ne comptent pas.

4.3. “Selon le contenu” : quand la majorité simple suffit, et quand non

  • Si cela régule la coexistence ordinaire → majorité simple.
  • Si cela limite des droits ou modifie les usages → relève des Statuts → unanimité ou 3/5.

4.BIS. Pourquoi avoir des Statuts et un Règlement s’il existe déjà des lois ?

  1. La loi fixe des limites, mais ne régule pas la coexistence réelle.
  2. Sans Statuts, les usages légaux ne peuvent pas être limités.
  3. Sans Règlement, chacun interprète ce qui est “gênant”.
  4. Devant un juge, disposer de règles internes renforce la position juridique.
  5. Permet de s’adapter aux réalités de villes soumises à une forte pression touristique.
  1. Cas pratiques que les communautés peuvent réguler et gérer

5.1. Appartements touristiques (HUT)

La communauté peut :

  • les interdire avec une majorité de 3/5,
  • les limiter,
  • imposer des règles de coexistence.

Comment dénoncer un HUT illégal ?
À Barcelone et L’Hospitalet, il existe des canaux d’inspection.

La communauté peut signaler :

  • bruits,
  • circulation constante de personnes,
  • annonces sans numéro HUT.

La municipalité peut sanctionner, sceller ou ordonner la cessation.

5.2. Activités professionnelles gênantes

Studios de musique, ateliers, cabinets, petits commerces…

Les Statuts peuvent limiter ou interdire les activités qui affectent la coexistence.

5.2.BIS. Animaux de compagnie et coexistence

❌ Les animaux ne peuvent PAS être interdits de manière absolue
Ce serait disproportionné et contraire au droit.

✔ Ils peuvent être régulés :

  • animaux tenus en laisse,
  • hygiène et bruit,
  • responsabilité,
  • accès limité à certaines zones.

✔ En cas de nuisances graves → action en cessation (art. 7.2 LPH)

La médiation est très utile dans les conflits liés aux animaux.

5.3. Activités illicites : prostitutions et appartements de trafic de drogue

La communauté peut agir via :

  • mise en demeure formelle,
  • intervention policière et municipale,
  • action judiciaire en cessation avec mesures conservatoires.

La médiation n’est pas applicable dans les cas d’activité illicite.
L’intervention juridique et policière est nécessaire.

5.4. Personnes ayant de graves troubles de santé mentale générant du bruit constant

Situations très délicates : cris, coups, musique, comportements répétitifs…

Bien qu’il s’agisse de personnes vulnérables, les voisins ont droit au repos et à la sécurité.

La communauté peut :

  1. Envoyer une mise en demeure formelle.
  2. Demander une intervention municipale ou policière (protocoles de santé mentale).
  3. Contacter les Services sociaux, équipes de crise ou Santé publique.
  4. Déposer une action en cessation (art. 7.2 LPH) en cas d’atteinte grave.

La médiation est utile lorsqu’il existe des proches ou des responsables qui peuvent coopérer.
Elle ne l’est pas en cas de décompensation sans soutien.

5.5. “Piso patera” : sur-occupation et insalubrité

Cohabitation de nombreuses personnes, rotation constante, risque d’incendie, saleté, bruit…

Les municipalités peuvent agir fermement.

La communauté peut :

  1. Exiger la cessation pour bruit et insalubrité.
  2. Signaler aux services municipaux (sur-occupation, salubrité, discipline du logement).
  3. Demander l’intervention des services sociaux et de la police.
  4. Engager une action en cessation (art. 7.2 LPH).

Ces cas ne sont pas médiables, car impliquent souvent des violations graves ou des activités illicites.

5.6. Usage abusif du logement ou de la terrasse pour des activités non autorisées (ex. : salon de coiffure)

Si quelqu’un utilise un logement ou une terrasse pour :

  • un salon de coiffure,
  • un studio de tatouage,
  • un atelier,
  • un commerce déguisé…

La communauté peut :

  1. Le limiter ou l’interdire dans les Statuts.
  2. Exiger une licence municipale (souvent absente).
  3. Exiger la cessation pour bruit, odeurs ou circulation de clients.
  4. Demander la nullité si cela affecte les éléments communs.
  5. Activer l’action en cessation (art. 7.2 LPH).

La médiation peut fonctionner pour des activités légales mais gênantes (cours, thérapies, etc.).
Elle n’est pas utile pour des activités illégales ou sans licence.

5.BIS. Que se passe-t-il lorsqu’une personne enfreint les règles ? (Protocole complet)

  1. Mise en demeure formelle.
  2. Actions internes (majorité simple) : rapports, demandes, médiation, intervention municipale.
  3. Actions judiciaires : cessation, dommages-intérêts, mesures conservatoires.
  4. Sanctions municipales.
  5. La médiation est recommandable dans la majorité des conflits de voisinage.
  1. Normative catalane et municipale
  • Loi 18/2007 du Droit au Logement, arts. 41 et 42.
  • Décret 75/2020 (HUT).
  • PEUAT à Barcelone.
  • Ordonnances de civisme et de bruit.
  • Mesures spécifiques à L’Hospitalet contre les HUT illégaux et les “narcopisos”.
  1. Le rôle du médiateur et de l’administrateur

Travailler conjointement permet :

  • de prévenir les conflits,
  • de rédiger des règles équilibrées,
  • de générer des consensus,
  • d’appliquer des protocoles,
  • d’éviter des litiges inutiles.

La médiation de voisinage est l’un des outils les plus efficaces pour restaurer la coexistence en cas de tensions récurrentes.

  1. Conclusions

Les Statuts et le Règlement :

  • ne sont pas une formalité,
  • sont un outil de coexistence,
  • apportent une sécurité juridique,
  • permettent à la communauté d’agir,
  • et constituent la base de la prévention des conflits de voisinage.
  1. Contact professionnel

Daniel Sererols Villalón
Médiateur de conflits et avocat
Spécialiste en médiation de voisinage, prévention des conflits et rédaction de Statuts et Règlements.

📞 661 463 306
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